Pour commencer, cette chronique provient de FNlutte et plus précisement de Vingtras.
Il nous partage ses divers "aventures" de ses débuts dans un séminaire de lutte jusqu'à son premier match pro au fin fond du Michigan. Tous les 2/3 mois environ, ce Français qui a quitté nos terres pour les USA et "profité" au mieux de sa passion, poste une nouvelle chronique sur son aventure.
C'est un vrai régal à lire que je ne peux que vous conseillez.
Il nous partage ses divers "aventures" de ses débuts dans un séminaire de lutte jusqu'à son premier match pro au fin fond du Michigan. Tous les 2/3 mois environ, ce Français qui a quitté nos terres pour les USA et "profité" au mieux de sa passion, poste une nouvelle chronique sur son aventure.
C'est un vrai régal à lire que je ne peux que vous conseillez.
Vingtras a écrit:
The Road to become Der Ubermensch – Day One : Seminar with The American Wolves
Ce titre un brin putassier me permet d'introduire un possible concept. Pensant que le charme attribué à l'image du guerrier errant supplante tout, j'ai décidé d'en faire de même. Malheureusement, il n'y a guère plus de dragons à occire et tous les moulins ont émigrés en Hollande. Quant à sillonner les routes en quêtes de Dojo à défier, cela requiert un niveau considérable. Et plus indispensable et plus triste encore, des ressources conséquentes. Or, errer non sans avec un baluchon mais avec un chéquier n'a plus rien d'une errance.
Toujours est-il que l'anachronisme est ma principale qualité. En conséquence, j'essaye donc de fréquenter différents lieux afin de perfectionner ce que j'ai commencé et ce qui nous rassemble tous ici (pour mieux nous diviser ensuite) ; la lutte. Pour perfectionner ce que je considère comme « art » presque martial, il convient de rencontrer des styles différents. Ceci afin de ne jamais rester dans une maîtrise « facile » mais de toujours rester « étudiant ».
Je ne développerai pas davantage cela. Non pas parce que cela ne me passionne pas mais parce que le sujet de ce texte n'est pas mon non moins passionnant minois. Mais bel et bien le séminaire.
Commençons par une précision. Beaucoup pensent que l'atout du fan de lutte est qu'en aimant un domaine « underground », il se différencie significativement des autres. Il est pensé que cela fortifie l'ego. Ce qui est affligeant. Il n'y a rien de plus immature que le désir d'originalité totale. Mais il n'en est rien. Le réel intérêt d'être fan de lutte est qu'il est bien plus aisé d'avoir un contact non superficiel avec des personnes renommées que dans un domaine populaire. En effet, le fan de lutte étant peu nombreux, la star de lutte a plus aisément du temps à consacrer. On a vu HBK gérer une école ou Daniel(son) faire des séminaires. A ce qu'il paraît, même les géants de la Dragon Gate en ont fait du temps de la DG USA.
Voilà pourquoi pour qui cherche, il n'est pas malaisé de rencontrer des grands lutteurs lors de séminaires. Ceci ne sont jamais en France (bien que des écoles y réfléchissent) mais en UK, on a du beau monde. L'île a accueilli par le passé Jay Lethal, Colt Cabana et cette année les American Wolves : Eddie Edwards et Davey Richards. Rappelons que ceux-ci ont touché le sommet de la ROH (World Champ, Tag Champs) et d'autres feds (Davey PWG Champ). D'ailleurs, pour ceux qui ne suivaient pas l'indy à ce moment-là ; Davey a eu tout autant de détracteurs que de fans qui le qualifiaient comme le meilleur au monde. Quoiqu'il en soit, les deux sont maintenant au top de la TNA car ils sont Tag Champs. Inutile de dire que pour certains fans de l'indy, il était difficile de ne pas être excités en pensant à ce stage.
Venons-en maintenant à l'essentiel ; le contenu (l'aspect financier ou technique sera en dernier). Il est toutefois à garder à l'esprit que je vais m'atteler à décrire le stage de 5 jours de Niveau avancé. N'ayant pas participé à la semaine Niveau débutant (étais-ce de l'arrogance ? L'avenir très proche vous le dira).
Comme la majorité des séminaires de lutte, le premier matin consiste en des exercices physiques pour entailler la machine. Sautée la phase des présentations pour rentrer dans la douleur. On est comme ça (d'ailleurs, Eddie a du penser que j'avais une dent, voire même deux contre lui parce que ma mauvaise vue m'a contraint à le fixer pour tenter de le reconnaître, n'ayant pas eu de présentation pour vérifier). De mémoire, cela devait être 220 pompes, 220 squats, 200 sit-ups sans temps de pause. Puis il a fallut faire les exercices en courant dans le ring. A ce moment, rien de folichon techniquement (ce qui est normal). Toutefois, malgré la banalité des exercices, on s'aperçoit que Davey dirige tout. Il dicte les exercices et énonce le retour. Eddie est au contraire très en retrait (il était raisonnable de supposer possible à ce moment un désintérêt de sa part).
Mais bientôt viens le moment qui me fait tomber en pâmoison devant Davey. Celui-ci nous énonce qu'on va faire du chain-wrestling. Ventre-saint-gris, j'aime cela comme les lèvres d'une femme goût framboise. Venant d'un gaillard dont j'ai toujours admiré la fluidité des transitions, je ne peux que boire ses paroles. Il nous apprend alors des choses qui ne sont pas flashy (pas bondissantes ou incroyables) mais des transitions dont certaines font parties de ses plus cools. A ce moment, nous saisissons qu'il sera généreux dans le stage. La vitesse de ses reverses est l'un de ses points forts. Tandis que certains se seraient concentrés sur des basiques, il partage son talent. C'est ainsi que Davey nous montrera des reverses très esthétiques pour placer le Ankle Lock de … et ben de partout en fait. Ventre-saint-gris derechef! C'est ainsi que se passera la moitié du stage à apprendre des chains et à perfectionner le strike. Davey ne voulant pas faire apprendre de moves car il veut former « des professionnels ». Et un vrai lutteur a des bases parfaites. Il sera donc appris une dizaine de mouvements de chains et quelques pins originaux (dont un j'allais jusqu'à même ignorer l'existence …). Ces transitions ne sont pas bonnes qu'en début du match (on considère que le mat est le commencement du match). Effectivement, porter un Ankle Lock peut se faire dans une phase de fin de match et celles qu'il a enseigné étant très rapides et surprenantes, cela peut se placer n'importe quand (car cela ne cassera pas le rythme en raison de sa vitesse et de sa facilité d'introduction). Finalement, c'est plus au lutteur de décider si cela rentre dans son style ou non. A lui de voir si une fois le match lancée, il veut avoir des transitions variées ou s'il préfère des suites de moves en se concentrant sur d'autres choses. Aucune vision n'est la bonne. Elles sont ce qu'elles sont. Des visions, rien de plus.
Lors de la seconde moitié, il sera mis l'accent sur le heat (phase de domination du heel) et les Tags Teams (avec les retours réussis et avortés). Tout cela se faisant généralement dans l'improvisation la plus totale. Exercice extrêmement ardu pour qui n'y est pas rompu (et je parle pour moi) mais réellement indispensable. Notamment pour obtenir le calme et la sérénité permettant « de se voir dans le match ». En effet, il est dit qu'un bon catcheur arrive à se détacher de ce qu'il fait pour se voir en « spectateur » et donc fonctionner avec le public (que ce soit en heel en face). Pour le heat, nul ne contestera son importance (d'autant plus que c'est la moitié du match dans son « archétype »). Mais peut-être que certains diront que les matchs Tag Teams ne sont pas passionnants. Je ne sais pour le spectateur. En revanche, ce qui est certain, ce que l'implication est totalement différente d'un match solo. Pour un lutteur, le match en équipe est quelque chose dont il aurait tord de se passer, car il raterait une variation stimulante de son travail. A deux, il lui est possible de préparer des spots à deux, d'interagir plus facilement avec l'arbitre voire de communiquer avec son partenaire (par exemple, « Lorsque je jette le face dans les cordes et qu'il se retient, je distrait l'arbitre et tu lui mets un coup en Juda »).
Je suppose que peu des lecteurs ont déjà effectués des stages de lutte. Aussi, il faut savoir qu'il est fréquent (lorsque les profs sont de grosses pointures) qu'il y est des longs moments de paroles. Cela allant parfois jusqu'à durer une heure. Nonobstant cela, ce n'est jamais du temps perdu car ce sont des réponses aux questions des élèves. Cela portant sur la construction des matchs ou sur la vie de lutteur (les élèves voulant tous avoir une activité soutenue de lutteur). C'est ainsi qu'on a pu entendre parler Davey de leur passage à NXT. J'avais déjà lu qu'il déclarait que c'était un départ volontaire mais je concède que j'étais méfiant. Nonobstant cela, je reconnais mon erreur. En l'écoutant, il s'avère qu'il ne voulait pas donner le temps qui était nécessaire à NXT (cela pour son autre métier). Ce qui est un choix tout à fait respectable (la WWE, c'est un atout, mais seulement si ça n'enlève pas une chose indispensable). Quant aux réponses sur la construction du match, la plus intéressante est celle de Davey qui ne sell jamais en pensant à la « douleur » (hérésie pour beaucoup) mais en se focalisant sur le sentiment qu'il veut transmettre (blessé, surpris, furieux, sonné, …). C'est une vision qui demande à être pensée.
Mais alors, maintenant que vous savez que ses journées rendaient les étudiants fourbues ? Qu'en était-il de l'ambiance ? Et bien, très détendue. Davey a dirigé les entraînements tout le long mais il a une certaine accointance, pour ne pas dire une accointance certaine pour l'humour. Notamment sur le second degrés et l'exagération. Les deux derniers jours, son jeu favori consistait à mettre son élève le plus aimé (un fan très excentrique qui commençait les entraînements) contre d'autres dans le ring. Une fois ceci prêts, Davey disait les moves à faire. Mais cela n'était pas vraiment un exercice. Ce n'en était même pas du tout un. C'était des « délires » luttesque réalisé sur le ring. Ainsi, l'élève surnommé « Barrett » faisait des legdrops et se prenait des Rocks Bottoms. Davey nous faisait revivre des WM Moments (on a même eu un Worm). Me concernant, j'ai improvisé en esquivant le « Stink Face » que Davey avait demandé à Barrett de me faire (mon abnégation ne vient que de ma fierté, cette esquive était donc vitale). Agréablement surpris, il a voulu que j'enchaîne avec un Camel Clutch (c'était impossible de prévoir ce qu'il allait demander, j'vous dis). Une fois Barrett au sol, Richards lui a demandé quel était son lutteur favori (qui se trouvait être Tommy Dreamer … oui je sais … c'est choquant, hein …) et lui a ordonné de faire la pause de Tommy en subissant le Camel Clutch. Tout ceci en filmant avec son téléphone lors des moment où il ne tenait pas ses côtes, afin de l'envoyer à Tommy. J'ignore comment une personne détachée du moment lit ce passage. Mais je vous certifie que lorsque vous êtes fatigués et que Davey pête sa coche, on a tout sauf envie de l'arrêter.
Et concernant Eddie ? Très réservé le premier jour, il a de plus en plus pris la parole. Son rôle a alors consisté à donner des conseils personnels à chacun (toujours constructifs) … et a déconné avec Davey (Richards seul, c'est quelque chose, mais les deux ensembles, c'est monstrueux). J'ai notamment été l'un de ceux qui a le plus eu de retours de Eddie. En effet, tous les étudiants (exceptés Barrett) avait un meilleur niveau que moi. La raison à cela est qu'il faisait parfois de la lutte depuis 4 ans et avaient énormément d'expériences. Bien plus que moi, d'où mon retard. Ce qui est logique étant donné la différence de niveau entre la France et l’Angleterre. Néanmoins, on ne m'a jamais empêché de tenter les choses et j'ai donc tout fait (les deux essayent vraiment de ne pas laisser les élèves à l'abandon). Bien que méfiant au départ, j'ai donc une réelle sympathie pour Eddie malgré ses taquineries fourbes.
Côté pratique : Les stages durent 5 jours, soit 30 heures. C'est beaucoup (car très fatiguant) mais on voudrait plus. Néanmoins, c'est très formateur. Pour des gros noms, ce n'est jamais en France. Le prix peut varier mais c'est souvent aux alentours de 500 euros. Toutefois, on peut parfois tomber sur des affaires (ce stage m'a coûté la moitié). Généralement, l'organisation propose un logement à la semaine (cela pour environ 100 euros). Malgré le faible prix, on peut parfois être très bien placés. Ainsi, lors de ce stage, j'ai dormi dans un hotel en plein centre de Manchester. Pour conclure, disons qu'un stage en UK va vous revenir à 900 euros (si vous venez en avion, ce qui est le plus cher).
Et quant à la langue, qu'en est-il ? Est-ce un problème ? Ma foi, c'est un frein. C'est indéniable. Préparer un spot en plein match en se comprenant moyennement n'est pas aisé mais pour tout lutteur ambitieux, c'est quelque chose auquel il sera nécessairement confronté. Aussi, autant s'y habituer le plus tôt possible. A propos de la langue, elle est relativement moins gênante dans les « cours » dispensés car le jargon de lutte est connu du fan de longue date. De plus, chaque mouvement est montré en même temps qu'expliqué. L'élève étranger avec un niveau acceptable de la langue n'est donc pas perdu.
Pour conclure, cela en vaut-il le coup ? Foutredieu que oui. Évidemment, je conseillerai de faire un stage avec des lutteurs fameux lorsqu'on a un minimum de niveau. Car même si ils font des stages pour néophytes, on se rend moins compte de la chance qu'on a. Et oui, pas besoin des Wolves pour apprendre à faire une roulade. Je pense donc que faire un premier stage en France n'est pas une mauvaise idée. Quant à faire un stage avec les Wolves, je le recommande fortement. Personnellement, si je peux en refaire un, je le ferai. Le « frenchie » a encore beaucoup à apprendre d'eux.
Résultat du combat :
Victoire : Stage effectué sans heurts.
Bonus : Des jolies accointances.